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29 mai 2012 2 29 /05 /mai /2012 22:59

 

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J’ai espéré jusqu’au dernier moment voir Denis Lavant débarquer sur la scène de Cannes et faire exploser le palais façon Tetsuo dans Akira, et puis non. Défilé de croulants, de barbichus, de tronches qu’on voit tous les mois en couverture de Télérama depuis 20 ans, et cerise sur le gâteau de riz, le discours de Ken Loach, parfaitement indigne, en mode « kikou les pauvres ON PENSE À VOUS ». Tout cela m’a donné le sentiment que ces gens n’aimaient pas le cinéma, ni l’ Art, ni les jeunes, qu’il fallait mettre un terme à tout ce bordel. On m’a dit que le vrai Cannes était en marge, hors champs, dans les Off, je veux bien le croire. Outre le concentré de misogynie dans lequel baignait le festival depuis le début, tout ce que j’ai vu à la télé m’a foutu les boules.

 

Ces deux dernières semaines, j’ai occupé le plus clair de mon temps à mater des photos de Denis Lavant sur Google Image et Tumblr, ce qui m’a rappelé l’époque où j’étais obsédé par Winona Ryder. Si quelque chose demeure chez Denis Lavant d’absolument obsédant (sa tronche, son torse, son ventre, son nez, et quand tout cela se met à bouger ensemble sur du Corona) c’est aussi le cas d’Alien, film obsédant au possible, film le plus obsédant jamais réalisé.

On ne peut qu’adorer Alien, comme on ne peut qu’adorer Denis Lavant, car tous deux nous ramène à ce constat premier, très matinal : j’ai un corps, okay, qu’est-ce que j’en fous maintenant ? Un comédien d’une part, une idée de science-fiction de l’autre, chacun nous ramenant à une expérience du corps éminemment passionnelle, limite scato, faite d’interactions incessantes avec tout ce qui compose notre environnement.

Corps ouvert à la clope, à la musique, à la drogue, au sable, à la lumière, Denis Lavant est une valve dispo à toutes les biologies. Et l’Alien est aussi cet engin fou, défonçant chaque cloison, chaque frontière culturellement établie par les systèmes de domination. Mâle/femelle, homme/animal, vivant/non-vivant, mécanique/organique. Avec sa chaine de reproduction déployée en cathédrale baroque, l’Alien « ouvre une porte de sortie au labyrinthe », celui « des dualismes dans lequel nous avons puisé l’explication de nos corps et de nos outils. » (Haraway, Cyborg Manifesto). 

 

 

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Quand j’ai eu 8 ans, j’ai commencé à devenir littéralement obsédé par Alien. Je réclamais tout le temps à ma mère de me raconter le film, alors qu’il m’était strictement interdit de le voir. Et l’histoire commençait toujours par : « Il y a un crabe, qui s’accroche au visage, comme une main, son sang brûle… » UN CRABE, nan mais vous connaissez un truc aussi génial à raconter à un gamin ?? C’est totalement parfait. Alien est un authentique film pour enfant, je n’en ai jamais douté. Une histoire tombée comme un cadeau, au moment où le sexe venait juste de s’emparer de mon esprit pour ne plus jamais le quitter. Pondre un œuf. Dans un ventre. D’homme. Violer un homme. Accoucher d’un animal. Sexuel. Dis, moi aussi je pourrais pondre un œuf dans un homme un jour ?? Un conte de fées.

 

…//

 

J’ai 11 ans, on est dimanche après midi, mon père cuve son rosé les vaisseaux du nez complètement explosés, je lui demande si je peux regarder Alien 3. C’est oui. Je me rue sur le magnétoscope avant que ma mère n’arrive, j’ai la culotte trempée sa race. Le film ne me marquera pas plus que ça : trop sombre, au sens usé et cramé du terme, à l’exception biensur d’une autopsie sur fillette et d’un générique d’ouverture parfaitement magnifique.

 

…//

 

J’ai 12 ans, je découvre Aliens en VHS chez ma grande sœur à Paris. On est entre jeunes, on mange devant la télé, c’est l’anarchie, NO RULES. Je vous mets au défi de trouver un truc plus cool que de découvrir la Reine Mère Pondeuse des Aliens à 12 ans. Je veux dire, à part lire Cujo quand t’es en sixième. Rien ne sera plus jamais pareil, le monde est transformé. Ce qui m’amène à dire : Les pastilles préventives du CSA ne sont rien d’autre que des instruments de violences: elles décrètent qu’un enfant est un con dénué de tout sentiment esthétique et philosophique, un moins-qu’humain qu’il faut maintenir dans un état d’anorexie politique totale. Désormais, ne dites plus : ce film m’a carrément traumatisé quand j’étais gosse ! Dites : ce film m’a pris pour quelqu’un de sensible et m’a fait grandir en dépit des politiques fascistes du CSA qui pensait pouvoir m’avilir. Nous sommes plus fort que ça. D’ailleurs, les Aliens ne connaissent rien à cette fiction de l’immaturité inventée par le patriarcat : ils-elles en naissent déjà tout armées, épée et bouclier, dans une explosion de sang.  Ça fait plus de 10 ans qu’Aliens est dans mon top 5 des meilleurs films du monde, c’est un chef d’œuvre qui ne vieillira probablement jamais, c’est LE film.

 

 

 

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Et voilà, une longue intro pour dire que non, je n’attendais pas du tout Prometheus... Enfin si bordel, biensur, c'est juste que le film est décevant, voilà, globalement on se sent touTEs couillonéEs.

 

 

 

- Spoilers -

 

Vendu de façon offensive comme une toute nouvelle mythologie, l’univers de Prometheus ressemble plutôt à une braderie haut-de-gamme de tout ce que la seconde moitié des 90’s a pu charrier comme babioles extra-terrestres, par la grâce d’M6 notamment. Et tout y passe : mysticisme, quête des origines, grossesse transgénique, conflit science/religion, race éteinte, holocauste spatial, la totale. Un répertoire que le scénariste Lindelof semble apprécier puisqu’il avait déjà livré une relecture médiocre de l’abduction flick dans Cowboy Vs Aliens. Si Prometheus cite les Tommyknockers, parfois au plan près (les monceaux d’aliens séchés, la fin) c’est X-files qui se voit le plus souvent convoqué, jusque dans ses motifs les plus cultes (l’huile noire, la soupe primordiale, les temps anciens visités). Le film carbure au new age le plus décontracté, à tel point qu’on est surpris de ne pas tomber sur un réptilien, là, peut être, sous la peau d’une Charlize Theron en mode Diana-Bitch dans V. Embarrassant également de voir Ridley Scott se prendre les pieds dans le kitsch dés les cinq premières minutes lors d’une scène ahurissante sensée introduire Noomi Rapace : Dis papa, c’est où qu’on va quand on est mourru ? Hein ? ça veut dire que maman elle est au ciel ? REPONDS MOI PAPA PUTAIN, ET BIM, Contact, Jodie Foster, tenez, encore un chef d’œuvre que tout le monde va réévaluer. Prometheus se cherche parmi toutes ces références sans en dépasser une seule (pas même Combattre le Futur) puis  finit par se trouver, quelque part, au milieu des tentacules, dans l’outrance, le Grand-Guignol (un zombi désarticulé, comme ça, GRATOS), dans l’accessoire de série Z (la flutine !!). Là où Alien créait du suspens avec un simple atterrissage, ou s’attardait cinq minutes sur la propagation d’un acide à travers les cales, Prometheus montre tout, tout de suite et trop vite. A peine a-t-on atterrit qu’on doit déjà enlever son casque à oxygène (l’arrivée sur LV-227 est un sommet de non-science-fiction).

 

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Une de mes scènes préférées dans Alien : celle où Ripley prend le pouvoir sur le film. Non, vous ne monterez pas à bord du vaisseau, vous devez respectez la quarantaine. C’est moi qui donne les ordres en ton absence, Dallas. Alien est un film simple, qui créer des personnages inoubliables avec peu de choses, et qui embrase l’imagination avec une poignée de détails immenses. Un squelette géant coulé dans un fauteuil bioméchanique. Une vapeur électrique bleue. Il faut voir ce que Prometheus fait de tout cet héritage : le final d’Indiana Jones 4, ou peu s’en faut. Si Prometheus 2 il doit y avoir (et il y aura, obviously), on espère voir la veine science fantasy/space opera explorée au max, dans l’esprit de sa très belle scène d’intro (et encore, à condition de faire au moins aussi bien que les Chroniques de Riddick, largement supérieure au film de Scott).

 

 

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Et puis il y a LA scène. Mais si. LA scène du film quoi. Feminist Frequency, a très bien démontré la façon dont les productions de SF récentes mettaient en scène des grossesses fantastiques en mode torture porn (voir la vidéo ici). Il s’agit de créer du suspens en martyrisant le corps des femmes au niveau de leurs fonctions reproductrices. Je ne sais pas quoi penser de cette scène d’avortement (le premier mot qui me vient à l’esprit). Elle est d’une part très drôle (« Error 404 : cet appareil n’est pas configuré pour une anatomie féminine. ») malgré son incohérence (c’est la machine de Charlize Theron) et on peut facilement y lire un moment d’empowerment pro-choix. Globalement, que raconte le film ? La naissance d’une coalition pirate entre la femme, l’alien et le cyborg, décollant à l’assaut du patriarcat blanc (figuré de façon très littérale par les géants bodybuildés). La fin de Prometheus est pleine de belles promesses, mais difficile de cacher sa déception, quand ce n’est pas l’écoeurement qui domine : matraqués depuis des mois par une pluie de teasers, les geeks méritaient mieux qu’une préquelle de préquelle, un énième film introductif. On s’est touTEs rué dans les salles, la thune est là, on l’a bien craché, et la pub a encore une fois gagné. Reste la sainte quadrologie, de toute façon vous avez touTEs le coffret chez vous. Profitez-en pour remater Alien Resurrection. Un bordel de film, un sommet d’humour lesbien et d’érotisme dark. Une toute autre classe. 

 

 

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commentaires

J
<br /> Concernant le "robot opératoire", s'il est bien situé dans la chambre de Charlize, je pense qu'il est plutôt destiné à son père. Sans dec, quand tu vois le corps de Charlize dans le film, tu<br /> penses bien qu'il est parfaitement sain dehors et dedans.<br /> <br /> <br /> Pas de commentaire sur la scène de sexe (hors champ) entre la blonde et le grand noir ?<br /> <br /> <br />  <br />
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